« Entre le droit et la politique : les répercussions du jugement de la Cour européenne sur le partenariat stratégique et les accords de pêche entre le Maroc et l’Union européenne »
La suspension de l’accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne : Répercussions et contradictions de la politique européenne
La décision de suspendre l’accord de pêche entre le Maroc et l’Union européenne est l’une des questions les plus controversées de ces derniers temps, notamment après que la Cour européenne a refusé de reconnaître pleinement les accords incluant les régions du sud du Maroc, en se fondant sur la question de la souveraineté du Sahara marocain.
Cependant, une analyse approfondie révèle une contradiction entre le volet judiciaire et le volet politique dans la manière dont l’Union européenne traite le Maroc, soulevant des questions sur la cohérence de ses politiques extérieures.
Incohérence des positions : la justice européenne face à la politique
Bien que la Cour européenne ait rendu une décision juridique entravant le renouvellement des accords commerciaux avec le Maroc, plusieurs pays européens majeurs, tels que l’Espagne et les Pays-Bas, ont réaffirmé leur engagement envers des relations stratégiques avec le Royaume.
Les déclarations de la présidente de la Commission européenne et du Haut Représentant pour les affaires étrangères, Josep Borrell, soulignant l’importance de maintenir le partenariat avec le Maroc, illustrent cette volonté de renforcer les relations, ce qui soulève la question de la conciliation entre les décisions judiciaires et les impératifs politiques et économiques des États membres de l’Union.
Impact direct sur dix pays européens
Parmi les États membres de l’Union européenne, dix pays sont directement affectés par la suspension de l’accord de pêche, dont 128 navires ont bénéficié de ce partenariat entre 2019 et 2023, avec l’Espagne en tête.
Selon les données de l’Union européenne et du ministère espagnol de l’Agriculture et des Pêches, 92 navires espagnols exploitaient les ressources halieutiques dans les eaux territoriales marocaines. Les pays touchés incluent l’Espagne, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Portugal, les Pays-Bas, la Pologne, la Lettonie, la Lituanie et l’Irlande. Ces navires pêchaient le long des côtes marocaines, de Cap Spartel à la péninsule de Lagouira, y compris dans les régions du Sahara.
Cela soulève des questions sur l’impact de la décision de la Cour européenne sur les intérêts économiques de ces pays et sur leur capacité à faire pression pour le renouvellement de l’accord.
L’Espagne : la grande perdante
L’Espagne est le pays le plus affecté par la décision de suspendre l’accord, avec 47 navires d’Andalousie, 38 des îles Canaries et 7 de Galice qui dépendaient de la pêche dans les eaux marocaines. Ces régions exercent une forte pression sur le gouvernement de Pedro Sánchez pour renouveler l’accord, mettant Madrid dans une position difficile entre le respect des décisions judiciaires européennes et la protection des intérêts de son secteur de la pêche.
Les déclarations du ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, ont révélé l’engagement du gouvernement à soutenir le secteur de la pêche, ce qui reflète la gravité de la crise à laquelle l’Espagne est confrontée. Mais Madrid parviendra-t-elle à surmonter cette crise en négociant avec le Maroc, ou restera-t-elle prisonnière des décisions judiciaires européennes ?
Et ensuite ? Scénarios et prévisions
Dans ce climat de tension entre le volet judiciaire et le volet politique, il est évident qu’il est nécessaire de repenser le cadre des relations entre le Maroc et l’Union européenne, d’autant plus que la Cour européenne ne reconnaît pas les accords incluant les régions du sud du Royaume. La question est donc de savoir si les pays européens touchés feront pression pour renouveler les accords ou si la décision judiciaire restera le principal obstacle à cet égard.
D’autre part, le Maroc a affirmé sa position inébranlable de ne pas signer d’accord excluant les provinces sahariennes, ce qui met l’Union européenne face à un dilemme : trouver un compromis qui respecte la souveraineté marocaine ou faire face à des pertes économiques et commerciales importantes qui pourraient affecter le partenariat bilatéral.
Sommes-nous à l’aube d’un tournant stratégique ?
Le soutien exprimé par plusieurs pays européens, comme l’Espagne, la France, les Pays-Bas et le Portugal, reflète un désir politique fort de maintenir une relation stratégique avec le Maroc. Cependant, les décisions judiciaires restent un obstacle majeur à tout renouvellement potentiel des accords.
Sommes-nous donc à l’aube d’un tournant stratégique dans les relations maroco-européennes ? Et comment l’Union européenne peut-elle concilier ses engagements juridiques et ses intérêts économiques ?
Y a-t-il une contradiction dans les positions de l’Union européenne ?
Une question essentielle se pose ici : ce contraste entre la position de la Cour et celle des politiques reflète-t-il une incohérence au sein de l’Union européenne elle-même ? La Cour européenne fonde son jugement sur des règles purement juridiques, tandis que les États membres souhaitent préserver des relations stratégiques avec le Maroc, non seulement dans le domaine de la pêche, mais aussi dans des secteurs sensibles tels que la sécurité et la migration.
Cela nous amène à nous demander : l’Union européenne peut-elle trouver un équilibre entre ses décisions judiciaires et ses intérêts politiques et économiques ?